FILM: Los Decentes - Die Liebhaberin, Lukas V. Rinner, 2016


Los Decentes / Die Liebhaberin, Lukas V. Rinner, 2016 
Les gens décents/L´amante première en Autriche le 1er Septembre 2017, jusqu´au 21 Septembre au Metro Kultur Kinohaus (Film Archiv Österreich)


LIVRET Lukas Valenta Rinner, Ana Godoy, Martin Shanly, Ariel Gurevich CAMERA Roman Kasseroller | CUT Ana Godoy | MUSIQUE Jimin Kim, Jongho Vous | AVEC Iride Mockert, Martin Shanly, Andrea Strenitz, Mariano Sayavedra
104 min | Couleur



Belén, une femme de 32 ans issu d´un milieu défavorisé  de Buenos Aires, obtient un poste comme domestique chez une famille huppé à la périphérie. Ce nouvel environnement riche est clôturé et divisé par l´individualisme. La jeune femme timide s'intègre parfaitement dans ce quartier de luxe jusqu'au jour où elle découvre, au milieu de ce quartier conservateur, un camp naturiste. Au debut elle est invité, et plus tard elle deviendra membre à part entière de cette communauté. Soudainement, tout un nouveau sentiment se déroule en elle, une libération de sa condition sociale par la nudité. Un sentiment idyllique mais trompeur.



On peut voir avec une subtile ironie cette métamorphose, comment Belén, une simple femme de ménage, s'est lentement échappée de son rôle et se retrouve avec son corps. 

Belén poursuit ses devoirs jusqu'à ce qu'un premier nu du quartier éveille sa curiosité. Le camp nudiste adjacent est le contre-modèle de cet esclavagisme domestique.

Cette silencieuse spectatrice est très vite active dans les pratiques de la communauté échangiste très mal vue chez les riches et séparés par une clôture électrifiée. Tout au long du film, on verra des scènes très comiques: les cupcakes, le sexe tantrique, le coucher du soleil, les pratiques de tir, les pratiques au sein des naturistes ... 

L'actrice argentine Iride Mockert exprime cette compréhension intérieure par ses attitudes: penchée, soumise et le regard vers le bas. Soudain, dénudée, elle ressemble à la Vénus de Botticelli. Le personnage dégage tout d´un coup une beauté intérieure par sa nudité. D´ailleurs rentré dans ce camp, cette mise à nu fait perdre toute forme de hiérarchie et le corps exprime la beauté intérieure et spirituelle.



Une chose qui m´a frappé dans ce film c´est qu´il y a très peu de répliques surtout par l´actrice principale. La langue ne joue aucun rôle narratif au point parfois qu´on dirait que c'est du bruit. L´important ici c´est le jeu des acteurs et comment ils vont exprimer par leur corps le sentiment intérieur des personnages. Los Decentes porte le point de vue de Belén et le spectateur rentre et découvre ce monde nouveau par ce pantomime.

Lukas V. Rinner est né à Salzbourg et est allé étudier et faire carrière en Argentine. On peut se demander si ce point de vue peut correspondre à cet expat qui a grandi dans une culture autrichienne. Il est important pour lui de communiquer sans dialogues afin d´exprimer ses intériorités. 

Le directeur fait une critique inhabituelle de la société. C´est intéressant de noter comment Rinner prend du temps dans son drame. Il s'appuie sur de longues scènes avec peu de paroles et les personnages prennent toujours des attitudes calmes. 



Celons lui il est important de faire des films qui déclenchent une discussion sur la façon dont le corps et les relations humaines sont perçues, traitées et négociées dans la société contemporaine. Ici on va voir tout particulièrement une société riche, civilisé, symétrique, morale. Et au milieu de celle-ci un vide qui est une forêt sauvage, chaotique, où la nature règne avant tout mais où le sacré joue un rôle important dans ce lieu primitif.

Son deuxième long métrage a été produit dans le cadre du projet Jeonju Digital Cinema dont la condition était de réaliser le film dans les huit mois. Un projet Kamikaze de brainstorming et de réalisation dans les plus bref délais qui ont abouti à cette oeuvre délirante.


Le directeur utilise la structure sociale des grandes villes argentines comme source d'inspiration pour continuer à développer un style personnel dont l´humour est privilegié.

L'intérêt pour les classes sociales antagonistes et en particulier les dénonciations de la classe moyenne peut être vue sur son premier film Parabellum. Rinner avait déjà tenté d'éclairer cette volonté inhérente de la classe moyenne en Argentine. Aujourd’hui affaibli, la société est beaucoup plus polarisé entre une classe riche isolé et une misère de plus en plus régnante en Argentine. Un luxe absolu mis sur la pauvreté absolue créant un mélange dangereux. 

Rinner nous dit que dans le cinéma argentin actuel, la zone de la banlieue de Buenos Aires n'est guère représentée.  Il s´est intéressée à ces espaces "oubliés" et il est allé l´explorer avec un photographe. Ils découvrent une entrée d´un club échangiste au milieu de ces villas 4 facades. Pendant les week-ends d'été, on peut compter plus de cinq cents couples et célibataires se retrouver dans ce parc sauvage. Ce fut l´élément déclencheur de son film. 

Les gens décents, los Decentes - die Liebhaberin, une réflexion humoristique, ironique et laconique de la façon dont se définissent les relations sociales et une nature corrompue par l´homme.

Images et crédits:
(1) Scènes du Film © Lukas V. Rinner 
(2) Trailer du Film © Lukas V. Rinner

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